La disposition de l'espace n'est pas moins révélatrice. Dans le tableau des Offices, la partie droite s'ouvre sur une pièce définie géométriquement par la fenêtre et les tentures du mur. Cette prédominance de la géométrie et de la droite dans le décor fait valoir par contraste l'harmonieuse souplesse du nu, tout en suggérant par analogie sa fermeté interne. Dans le tableau du Prado, le traitement est tout autre: au lieu de servir de repoussoir, le fond entraîne l'oeil vers une profondeur indéfinie; au lieu de s'affirmer en s'isolant au premier plan, la Vénus s'estompe en cédant à l'attrait de la veduta. Celle-ci a encore un autre effet. Alors que, dans la Vénus d'Urbin, elle se limite à une pièce, dans la Vénus du Prado, elle gagne tout le parc jusqu'à l'horizon où le soleil se couche: espace "ramassé") dans la première, correspondant aux formes serrées du nu; espace "ouvert" dans le second, correspondant aux formes détendues de cet autre nu.